R comme Recrutement Militaire

Séance de tirage au sort pour le service militaire

Les fiches de recrutement militaire sont de véritables mines d’informations tant sur les conscrits que sur leurs familles. On y trouve, entre autres, les noms des parents et leur lieu de domicile. Sur les conscrits eux-mêmes, ces fiches nous renseignent sur leur date de naissance, leur métier, leurs attributs physiques, leur niveau d’instruction, leur état de santé, les décisions les concernant du conseil de révision, leur participation à des conflits ou encore leurs lieux de résidence et parfois leur statut matrimonial.

Malheureusement, elles ne concernent pas tout le monde ! Non seulement cela ne concerne que les hommes mais encore, avant la loi sur le service obligatoire de mars 1905, seuls ceux ayant tiré un mauvais numéro lors du tirage au sort. Quand on fait sa généalogie, il peut y avoir de grands absents.

Mais, vu la qualité des renseignements qu’on peut y glaner, je me suis amusée à examiner attentivement les fiches militaires de mes ancêtres directs trouvés en ligne. Ensuite, j’ai fait des comparaisons avec leurs frères ou leurs fils quand les fiches étaient disponibles. Voici ce que j’en ai retenu :

Ancêtres paternels :

Fiche de recrutement militaire d’Édouard Jean Guillaumant – Archives de Paris

Mon grand-père Édouard Jean Guillaumant n’avait pas été chanceux et avait tiré le numéro 147 parmi les conscrits du sixième arrondissement de Paris.

En 1901, sa fiche le décrit à vingt ans comme étant tapissier, mesurant un mètre cinquante sept avec un visage ovale, les cheveux et les yeux châtains. Ceux-ci n’étaient d’ailleurs pas très bons car il souffrait de myopie et devait porter des lunettes. Les autres Guillaumant, pour la plupart des cousins, avaient les yeux marron. À l’exception de son frère cadet Paul Henri qui avait les yeux vert-bleus.

Fiche de recrutement militaire d’Édouard Jean Guillaumant – Archives de Paris

Édouard Jean avait un bon niveau d’instruction et savait donc lire, écrire et plus. À cause de sa myopie, il n’a pas reçu d’instruction militaire. Le Conseil de révision l’avait plutôt dirigé vers les services auxiliaires avant de rapidement l’envoyé dans la réserve en novembre 1901.

Visite médicale au moment de passer devant le Conseil de Révision

Cela ne l’empêcha pas d’être mobilisé comme les autres en décembre 1914. Après une brève période d’instruction au maniement des armes, il fut envoyé sur les champs de bataille. Il a été blessé à Bouchavesnes-Bergen dans la Somme et est décédé trois jours plus tard le 17 septembre 1916, des suites de ses blessures de guerre.

Quant à ses lieux successifs de résidence, en 1914 alors que l’armée cherche à mettre à jour ses listes, on note deux adresses d’abord celle de son domicile sur le boulevard Victor Hugo, à Neuilly-sur-Seine et à son travail aux studios Eclipse, rue de la Tourelle à Boulogne.

Son frère Paul Henri Guillaumant de dix-neuf ans son cadet a également été conscrit. On peut voir qu’en près de vingt ans, la fiche a peu changé même si la section signalétique est plus longue, les renseignements consignés sont quasiment identiques : taille un mètre soixante-huit, visage ovale, cheveux bruns et yeux vert-bleus. Comme son frère ainé, il a un bon niveau d’instruction. Leur père est décédé et la famille habite maintenant la rue des Orteaux dans le 20e arrondissement.

Fiche de recrutement militaire de Paul Henri Guillaumant – Archives de Paris

Je n’ai trouvé aucune fiche concernant leur père Hippolyte Félix Frédéric Guillaumant, mais j’en ai une pour Jean Adam Frey le beau-père d’Édouard Jean qui est mon autre arrière-grand-père.

Fiche de recrutement militaire de Jean Adam Frey – Archives de Paris

Frotteur de son métier, Jean Adam est décrit comme mesurant un mètre soixante et onze, avec un visage ovale, des cheveux et des yeux châtains. Aucune mention ne concerne son degré d’instruction.

Né à Postroff en Alsace-Lorraine en 1854, il n’a probablement pas eu voix au chapitre en 1972 au moment de décider s’il voulait rester Français ou devenir allemand. Sa famille, étant germanophone et protestante, a préféré rester dans son village natal ce qui impliquait l’adoption de la nationalité allemande.

Publicité « BON pour le service » pour encourager
les jeunes gens à s’engager dans l’armée

Cependant, une fois majeur, Jean Adam a choisi d’aller rejoindre une soeur installée à Paris. Bien que né Français, Jean Adam a dû faire une demande de naturalisation qu’il a obtenue le 13 avril 1892.

Alors qu’il est déclaré « Bon pour le service », le conseil de révision a décidé de l’intégrer à la classe de 1874, celle de ses vingt ans alors qu’il en a maintenant trente-huit. Il est affecté au 26e régiment territorial d’infanterie stationné Place de Paris. Vu son âge, et la situation des autres conscrits de sa classe, il passe directement dans la réserve territoriale le 1er novembre 1894 et sera libéré six ans plus tard en novembre 1900 sans sembler avoir fait aucune période d’exercices. J’ignore si c’est dû à sa situation particulière ou au fait qu’il n’ait jamais reçu d’instruction militaire.

La réalité va être toute autre pour son fils Jean Robert Lucien Frey qui va être incorporé en 1920 et passer par plusieurs différentes affectations au cours des années suivantes. En 1921, il est nommé brigadier puis maréchal des logis un an plus tard.

Fiche de recrutement militaire de Jean Robert Lucien Guillaumant – Archives de Paris

Une nouvelle loi, votée le 1er avril 1923, lui permet de passer à la classe de 1918 en reconnaissance du fait qu’il a un enfant à charge.

Liste des corps d’affectation
de Jean Robert Lucien Guillaumant
– Archives de Paris

Une fois terminé son engagement, il est passé dans la réserve de l’armée active et a reçu différentes affectations dans les hussards et les dragons avant de passer dans l’armée de réserve et à la cavalerie. Il se peut donc que ce soit lui que l’on voit sur certaines mystérieuses photos de famille. Ces photos de militaires ne sont malheureusement ni datées ni identifiées.

Similairement, l’armée a pris note de ses nombreux déménagements. Grâce à ce document, je suis capable de le situer chez sa soeur près de Reims en 1922, à sa sortie de l’armée et dans plusieurs localités comme Boulogne-Billancourt ou Rueil dans les années subséquentes.

Ancêtres maternels

Du côté de ma mère je n’ai actuellement accès qu’à la fiche de mon arrière-grand-père Jean Anet Gourcy né en 1883.

Né à Fournols dans le Puy-de-Dôme, en 1904 il est dit terrassier. Sa fiche le décrit comme mesurant un mètre soixante et onze avec un visage ovale, des cheveux et des yeux châtains.

Il a tiré le numéro quarante-huit compris dans la 2e partie de la liste mais comme il est orphelin de père, il sera classé  » Bon dispensé » du service en tant que « fils unique de veuve ». De plus, dès 1905, il est réformé à cause de problèmes de santé.

Fiche de recrutement militaire de Jean Anet Gourcy – Archives du Puy-de-Dôme

N’ayant jamais reçu d’instruction militaire, en 1914, au moment de la mobilisation générale, il est reconnu apte au service armé et sera affecté au service auxiliaire en tant qu’infirmier. Alors qu’il passe dans l’armée territoriale en octobre 1917, c’est à ce titre d’infirmier qu’il fera la campagne d’Allemagne du 29 mars 1915 au 3 janvier 1919.

Si sa fiche est muette sur son niveau d’instruction, on peut imaginer qu’en tant qu’infirmier, on lui aurait attribué le niveau 3, signifiant qu’il sait lire, écrire, compter et plus.

Fiche de recrutement militaire de Jean Anet Gourcy – Archives du Puy-de-Dôme

Cette étude détaillée des fiches militaires de mes ancêtres et celles d’autres parents, m’a appris bien des choses sur l’évolution du service militaire au travers des années et sur les différentes exemptions possibles. Elle m’a aussi mise sur de nouvelles pistes pour retracer leurs parcours ou m’éviter certaines recherches inutiles. J’ai hâte d’avoir accès à la fiche de mon grand-père maternel qui n’est pas encore en ligne.

Sources :

La refondation du service militaire après la guerre de 1870-71 par le capitaine Xavier Boniface, lettre de la prospective n. 2, juillet 2017

Publié par L'abécédaire de mes ancêtres

Bonjour, D'origine française, je vis au Canada depuis plus de 40 ans. Généalogiste amateure, j'essaye de retracer la vie de mes ancêtres. Grâce à l'aide inestimable de parents mais aussi à des photos d'époque et à des articles de journaux ainsi qu'à des documents d'état civil et d'archives, je m'efforce de remonter le temps. Les articles réunis dans ce blogue sont principalement destinés à ma famille mais aussi à toute personne intéressée à l'histoire du quotidien et de gens ordinaires ayant mené une vie supposément sans histoire. Dominique G.

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